Palatin d’avenir
2005-2023 : termes de mécène et de collectionneur typographique
Avec ma retraite de la typographie vient le terme de ma collection typographique, entamée en 2005 dans un cybercafé d’Aix-la-Chapelle, achevée aujourd’hui en 2023 dans un espace de coworking à Neuilly-sur-Seine.
J’ai commencé avec l’Ambroise, je termine avec l’Anormal, c’est toutefois en composant et en regardant l’Avenir que je viens donner un sens rétrospectif à cette collection.
Je n’ai que récemment découvert l’intense humilité de l’Avenir, la marque d’un regard lucide et ouvert sur le monde. Frutiger donnant le meilleur de lui-même, en 1988. Je ne découvrirai la typographie que quelques années plus tard, mais il y avait déjà tant de choses en 1988.
Au cours de mon parcours d’acheteur, il me semble que l’offre typographique s’est banalisée et spécialisée en même temps, étendue et réduite, la saturation du latin rend les lacunes dans les autres scripts plus criantes. D’immortelle ou divine, la typographie est devenue anormale, anormale dans un monde anormal. Pourquoi autant d’énergie, de tension dans la forme des mots ? Pourquoi la discrète et noble Imprimerie est-elle devenue une vaste Exprimerie aux contours si agités, si dispersés ? Qu’est-ce que cela dit de l’époque ? A world looking for word, word as a bond. L’équation word=world est posée.
Que vais-je faire de cette collection ?
L’inventorier distraitement et discrètement, moins si on sollicite un jour mon témoignage.
Quel est mon caractère favori ?
Je reste indéfectiblement attaché au Palatino. Il existe en maintes versions dont l’exquis Palatino Nova.
Malgré tout ce que j’ai pu acheter par ailleurs, le Palatino Nova reste l’acquisition cardinale — grec, cyrillique, hinting TrueType, intemporalité.
Ce miroir de mémoire et de conscience traversant les dimensions du savoir, de l’espace et du temps.
Rassasié assez mais curieux toujours, je reste un palatin de l’avenir. Composer avec l’avenir, lire sous le ciel.